Le cuisinier, le voleur, sa femme et son amant
Peter Greenaway

Mercredi 18 avril 2012 - 19H00
à l’École Spéciale
Projection

Le cuisinier, le voleur, sa femme et son amant Peter Greenaway
Ciné-Club de l’ESA
A l’occasion de la conférence de Peter Greenaway organisée dans le cadre du cours "Ephemeral architecture" de Brent Patterson en semestre 5,
Projection du film Le cuisinier, le voleur, sa femme et son amant, Peter Greenaway, 1989

Le Cuisinier, le Voleur sa Femme, et son Amant évoque par son titre l’esprit des Contes de Canterbury de Chaucer, mais le modèle avoué du film est "la tragédie de la vengeance" du théâtre élisabéthain et de Shakespeare en particulier. Greenaway confond avec ironie les genres et les styles, dans un chassé-croisé amoureux et gastronomique qui oppose l’art au pouvoir et l’asservissement des désirs à la révolte des pulsions. L’auteur y raconte l’histoire d’un cuisinier qui reçoit tous les soirs dans son restaurant chic un client riche, mais mal dégrossi, le voleur Albert Spica. Ce voleur est marié à une femme distinguée du nom de Georgina. Celle-ci tombe amoureuse d’un autre client, Michael, doté de plus belles manières. Les deux entament une liaison secrète avec la complicité du cuisinier, jusqu’au jour où le voleur le découvre et se venge.

Le film est construit en trois actes avec un prologue et se déroule sur dix jours. Un thème spatial et coloré organisé autour de quatre grands tableaux composent picturalement le film. Chaque lieu a une couleur différente. Le parking à l’extérieur, froid et nocturne, donc bleu, est abandonné aux chiens, qui occupent seuls cet environnement post apocalyptique. Un travelling latéral mènent aux gigantesques cuisines aux verts permanents et naturels dont l’harmonie paradisiaque tranche avec la décadence baroque de la salle à manger, baignée d’une série de rouges et de pourpres, couleurs d’honneur et de sang, où officie le voleur, tel un seigneur, régalant ses convives d’histoires grivoises. Derrière eux, dominant du regard ce lieu où se jouent goûts et dégouts, le banquet des officiers de Saint Georges de Frans Hals. Le dépôt des livres est peint dans les tons chauds du marron et de l’orange. L’hôpital est en jaune d’œuf pour indiquer la naissance, la maternité, la fécondité. Les toilettes sont blanches, le blanc est la combinaison de toutes les couleurs et c’est dans les toilettes que se réalise la somme de toutes les actions positives du film. Il y a 2 autres couleurs : le turquoise pour une scène de rue et le noir pour une scène en extérieur où un personnage, Pup est torturé.

Albert Spica n’est pas qu’un citoyen malhonnête, désagréable et vicieux. Il incarne le mal absolu mais d’une façon moderne. C’est un consommateur, un être vorace qui n’attache de valeur à rien et connaît le prix de tout. Il fait aussi figure d’impuissant et il trouve par conséquent un certain assouvissement dans le fait de manger. Michael, l’amant de Georgina, puise dans les livres une partie de sa nourriture, il mange peu mais semble doté d’une grande puissance sexuelle. Michael se voit davantage comblé par un équilibre entre 3 plaisirs : ceux de la table, de la bibliothèque et du lit. En toute logique, Spica, le voleur, ne peut que déclarer qu’il mangera son ennemi.

Greenaway, par cette fable dure et extravagante, semble dénoncer les travers d’une société néolibérale, où l’argent et le pouvoir de consommer font foi de tout, au détriment de l’art qui, lui, porte pourtant en son sein le salut d’une humanité en perdition.

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Infos pratiques :
Amphi Cinéma, École Spéciale d’Architecture
Entrée libre dans la limite des places disponibles